Comment Toshiba, fleuron industriel japonais fondé par Tanaka Hisashige en 1939, a sombré dans le chaos à partir de 2015 sous la direction d'Hisao Tanaka après un scandale de falsification comptable de 1,2 milliard de dollars?
Histoire
En 2015, Toshiba, une institution de l’industrie japonaise active depuis des décennies dans l’électronique, l’énergie, les infrastructures et l’équipement industriel, est secouée par un scandale comptable majeur. Un comité indépendant révèle que le groupe a gonflé ses bénéfices d’environ 1,2 milliard de dollars sur plusieurs années (2008 à 2014), en retardant la reconnaissance de pertes, en anticipant des profits futurs, et en masquant des coûts. Les pressions internes sur les divisions pour atteindre des “objectifs ambitieux” auraient encouragé ces manipulations.
Le PDG Hisao Tanaka démissionne le 21 juillet 2015 dans la tourmente, suivi de nombreux autres cadres supérieurs.
Le scandale ébranle la confiance des investisseurs, provoque une chute importante du cours de l’action et force Toshiba à retirer ses prévisions financières et à annuler son dividende.
Mais ce n’était que le premier coup : parallèlement, les investissements de Toshiba dans sa filiale nucléaire américaine Westinghouse Electric tournent au désastre. Après l’acquisition de Westinghouse en 2006, Toshiba avait parié sur la renaissance du nucléaire aux États-Unis. Cependant, la construction de réacteurs nucléaires (notamment des modèles AP1000 en Géorgie et de la centrale V.C. Summer en Caroline du Sud) connaît des dépassements de coûts massifs, des retards prolongés, des litiges contractuels et des imprévus techniques.
En mars 2017, Westinghouse dépose le bilan (Chapter 11 aux États-Unis). Toshiba reconnaît alors des pertes colossales : plus de 9,8 milliards de dollars de passifs liés à Westinghouse, plus des dépréciations de goodwill et des charges supplémentaires pour plusieurs milliards.
Ces pertes affaiblissent gravement la structure financière de Toshiba.
La combinaison du scandale comptable (perte de crédibilité, sanctions, restructurations internes) et des pertes massives de Westinghouse entraîne une spirale négative. Toshiba est poussée à vendre des actifs, à réorganiser ses divisions, et à subir une perte de confiance durable. Le groupe perd des milliards en valeur, son image est ternie, et son avenir est mis en question.
Leçons à tirer
La transparence comptable et l’intégrité sont indispensables à la confiance des marchés, qu’un pari industriel ambitieux doit être évalué avec rigueur pour éviter des passifs insurmontables, que la gouvernance doit contenir les pressions internes afin de prévenir des distorsions dangereuses, que la diversification excessive et les acquisitions coûteuses exposent le groupe à des pertes structurelles si le contexte change, et enfin que même une marque respectée peut être rattrapée par des fondamentaux fragiles en période de crise.
Acteur et organisation
Organisation : Toshiba Corporation, conglomérat japonais présent dans l’électronique, l’infrastructure, l’énergie, etc.
Acteur au moment du scandale : Hisao Tanaka (PDG démissionnaire en 2015) puis les dirigeants intérimaires (Masashi Muromachi, Taro Shimada) dans les phases de crise.
Période :
Falsification comptable dévoilée : 2015 (profit surévalué de 2008 à 2014)
Pertes massives liées à Westinghouse : 2016-2017 notamment, dépôt de bilan de Westinghouse en mars 2017
Crise prolongée : à partir de 2015 jusqu’aux années suivantes, avec restructurations, ventes d’actifs, perte de valeur continue.
Source
