Histoire et leçons à tirer
Histoire
L'histoire de Lormauto se résume en quelques points qui sont : l'origine de Lormauto, son objectif et des difficultés avec l'aide qui souhaitait leur être apportée.
Comment l’idée de créer la société Lormauto est née ?
Fin 2018, les gilets jaunes protestent contre la hausse du carburant en France. Sébastien Rolo affirme : « À cette époque, je faisais beaucoup de route et le prix de l’essence pesait sur mon budget ». C’est alors qu’il veut avoir une électrique. Mais, il rencontre deux difficultés : il se trouve que soit les voitures neuves qui sont disponibles, et qui pourraient être achetées ne sont pas assez autonomes pour lui, soit il les trouve beaucoup trop chères. C’est alors qu’il découvre le "rétrofit", « conversion du moteur thermique en moteur électrique ou hybride rechargeable », technique très utilisée en Californie, état américain. La loi française n'a autorisé le rétrofit qu’à partir du 23 décembre 2019, dans la loi d’orientation des mobilités, dite LOM (la LOM a été publiée dans le Journal Officiel de la France le 26 décembre 2019).
D’après le site Ouest France, Sébastien Rolo se retrouve confiné, de surcroit sans travail en mars 2020. C’est à cette période que Sébastien Rolo va repenser à la rénovation de voitures comme projet. Il va présenter son projet à sa famille. Sa famille trouve son projet « vertueux pour la planète ». D’après le site Ouest France, « Il appelle la cellule d’incubation de Normandie et rencontre un de ses deux associés Franck Lefèvre. ». Le 30 juillet 2020, Sébastien Rolo et Franck Lefèvre, tous deux experts en informatique, créent Lormauto. Lormauto se rapproche du nom du grand-père de Sébastien Rolo. Après la Seconde Guerre mondiale, son aïeul a construit une voiture en récupérant divers matériaux , en 1954. Selon Sébastien Rolo, elle a tenu jusqu’en 1967. Olivier Zanusso, ancien directeur de l’usine Faurecia rejoint l’équipe avec d’autres. Sébastien Rolo souhaite construire des voitures durables comme son grand père, sans forcément que nous y établissions un rapport.
Quel est l’objectif de Lormauto ? Aider la France à atteindre son objectif de décarbonation, objectif aligné avec celui européen d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Comment cela va-t-il se passer ? Il s’agira de transformer des voitures thermiques (Twingo, Kangoo, Partner, Berlingo) en voitures électriques. Le but n’est pas de construire de « nouvelles » voitures , mais plutôt partir du parc automobile existant ; ne pas jeter, mais réparer. Dans le projet des fondateurs, les voitures transformées seront : durables, accessibles à tous, économiques, et écologiques (pour éviter la pollution). En effet, les transports en France sont considérés comme l’activité la plus polluante ; ils sont « Responsables d’environ 30 % des émissions de gaz à effet de serre ». Aussi, la modernisation d’une voiture permettrait de diminuer de près de 70 % la consommation de CO2 par rapport à la conservation d’une voiture de type diesel. L’objectif est de rendre « la mobilité électrique la plus accessible possible ». C’est pourquoi les associés ont choisi la Twingo I, modèle qui se trouverait « facilement », pour le rétrofit.
Lormauto présente un modèle de voiture retrofitée : en 2021 au Festival de l’Excellence Normande (FENO) et en 2022, au Mondial de l’automobile de Paris, une Renault Twingo 1 retrofitée. Après ces présentations, vu le nombre de commandes, Lormauto initie le processus d’homologation en 2022, qu’elle finit par avoir en novembre 2023. Selon le site Ouest France, « Olivier Zanusso est désormais là « à plein temps pour conduire l’industrialisation » ».
Quelle est l’offre ?
Lormauto propose la location d'une voiture électrique à « 200 €/mois, sans premier loyer et sans abonnement, avec kilométrage illimité et entretien inclus. » . Un des bénéfices de la location est qu’elle garantit l’usage. Si l’État accorde son bonus écologique, Lormauto souhaite proposer sa Twingo dès 100 €/mois. Lormauto remplace « la mécanique thermique par un bloc électrique de 38 kW/51 ch d’origine italienne, alimenté par des batteries LFP de 16 kWh. Lormauto refait à neuf les suspensions, le freinage, les trains roulants, les sièges (mousse et sellerie) et installe de nouveaux pneus. L’entreprise va même jusqu’à nettoyer (voire remplacer) les moquettes et repeindre le tableau de bord en noir afin d’améliorer la qualité perçue .». Cette twingo retrofitée aurait une autonomie variant de 100 à 150 km. Sébastien Rolo avoue que « le coût de ces transformations est bien trop élevé pour proposer le véhicule à la vente. ».
En octobre 2023, Lormauto est lauréate de l’Appel À Projets Invest Auto 2023 dans le cadre de l’appel à projets de la Banque Publique d’Investissement française. Le 15 novembre 2023, Lormauto obtient son homologuation. En 2024, Lormauto propose au Mondial de Paris sa Renault Twingo dès 12 500 € (après déduction du bonus et autres primes). Lormauto fait un accord avec Dangel, société française de fabrication d’automobiles pour profiter de leur réseau, de leur carnet d’adresses et du site de production du spécialiste alsacien de la conversion 4 x 4.
Mais, qu’est-ce qui s’est passé pour que Lormauto ferme ses portes en 2025, après ces expériences de réussite ? Lormauto ferme les portes, parce que les fonds attendus n’ont pas été versés comme initialement prévus, malgré l’intérêt que présente l’entreprise pour la France en général et la population, en particulier. Sébastien Rolo déclare : « On a fait sur fonds privés tout ce qu'il fallait pour arriver à l'industrialisation, on a livré les premiers clients" . En effet, Lormauto fonctionnait sur fonds propres de l’entrepreneur, et des fonds privés. Lormauto attendait aussi une subvention de l’État. Par exemple, Initiative Calvados a donné 50 000 € à Sébastien Rolo, pour son projet. Lormauto attendait 2 500 000 euros de BPI France. Lormauto en a reçu déjà 600 000. Lormauto attendait de recevoir encore 1,3 million d’euros. Mais, cette somme n’est pas arrivée. BPI France déclare : « Il s’avère que le positionnement de la solution Lormauto, notamment en termes de prix, ne lui a pas permis de se développer comme envisagé, mettant en cause les perspectives annoncées par les dirigeants. BPI France a donc décliné le dossier, laissant la place aux acteurs privés ». Or, certains partenaires privés attendaient aussi ce financement pour investir à leur tour. Selon le site de France 24, BPI a répondu qu’elle croit au rétrofit ; cependant, elle s’est rétractée après avoir interrogé le Fonds Automobile (FAA), abondé par Stellantis (société de fabrication de voitures), Renault et l'État; puis, elle a donné comme réponse la réponse citée ci-dessus remettant en cause le positionnement de Lormauto en termes de prix et les perspectives annoncées par les dirigeants de Lormauto.
Sébastien Rolo se remet en question. Peut-être que finalement, la confiance n’était pas au rendez-vous. Il rapporte : « Nos actionnaires nous disaient que le rétrofit n’était pas un truc d’avenir, qu’il n’y avait pas de profondeur de marché et que la France avait besoin de petits véhicules électriques pas cher, donc pas produits en France et probablement pas en Europe ». D’autres idées étaient évoquées: comme la «…Renault Twingo à 20 000 € conçue en Chine et fabriquée en Slovénie » ou encore Stellantis « qui va soutenir l’implantation d’une usine en Espagne pour assembler des Leapmotor ». En réalité, il mentionne que le rétrofit d’un utilitaire s’estime à près de 21 000 € contre 33 000 à 35 000 € pour un véhicule neuf. Il faut rappeler que Lormauto « était la seule plate-forme de rétrofit totalement indépendante de tout constructeur » ; quand par exemple, la société Quinomic, experte du rétrofit, soutenue par BPI France, signe en décembre 2022 un partenariat avec Stellantis pour l’électrification de ses VU légers. Nous pouvons aussi citer Tolv (société de rétrofit en France), qui a signé un partenariat avec le groupe Renault depuis 2022. Tolv assemble ses kits sur les utilitaires de Renault.
Le 21 mai 2025, Lormauto a subi une liquidation judiciaire, prononcée par le tribunal de commerce de Caen, en France. Lormauto avait des projets, si tout allait bien notamment : l’ouverture d’une autre usine en France, puis en Europe, la construction d’autres voitures rétrofitées, et l’emploi de nouveaux salariés pour supporter la charge du travail.
Leçons à tirer
L’élément clé autour duquel tourne le soi-disant échec de Lormauto est un détail financier. Les fonds attendus n’ont pas été versés comme prévu.
Hormis, ce fait, il faut savoir que toute création existante sur la terre (les immeubles, les musiques en passant par les objets de tables, des choses parfois immatérielles) naît de la pensée, de la vision d’une ou plusieurs personnes. Ce n’est qu’en échouant ou en réussissant, que la terre en prend conscience. Une réussite commence parfois par un échec apparent.
Pour réaliser un projet, il faut des ressources internes comme externes ; cela Sébastien, président et initiateur de la société Lormauto, le savait. En effet, le Réseau Initiative Calvados sur son site rapporte : « Selon Sébastien Rolo, lorsque l’on se lance dans l’entrepreneuriat, il est très important d’avoir un projet parfaitement réfléchi au départ, de s’assurer que la trésorerie est suffisante, de ne pas croire que son projet est le meilleur du monde et enfin de bien s’entourer car « on ne peut pas tout faire tout seul ». ».
Un autre point factuel est que la vision peut -être claire, les stratégies aussi. Mais, si le projet est trop couteux, qu’il a des solutions couteuses pour la population et/ou le producteur, et n’est pas finançable de par lui-même, parfois il inquiète et/ou n’encourage pas les investisseurs. Selon le site Ouestfrance, Lormauto rachetait des Renault Twingo d’occasion. Après, elle y implantait un moteur et des batteries électriques. Vu la charge du travail de transformation, proposer le véhicule rénové à la vente ne serait pas intéressant. C'est pourquoi Lormauto aurait préféré la location de loin à la vente d'un véhicule rénové. De plus, si la réalisation du projet ne rencontre pas les promesses souhaitées, à long terme, il inquiète davantage les investisseurs.
Parfois, les premiers promoteurs ou supporteurs d’un projet viennent de la famille, des amis. Il faut savoir s’entourer et reconnaitre les amis où les ennemis du projet. Pour Sébastien Rolo, il était entouré de sa famille, de tous ceux qui avaient une idée écologique de la planète. Cependant, cela n’a pas suffi pour faire tenir le projet Lormauto. L’aspect financier a pesé dans la cessation des activités de Lormauto.
L’entrepreneur possède parfois des modèles ; c’est-à-dire qu’il a soit des modèles de réussite, actions à imiter ; soit des modèles d’échec, actions à ne surtout pas reproduire, à éviter donc. Pour l'entrepreneur Sébastien Rolo, son grand-père avait déjà construit une voiture, de plus qui a duré. Il pourrait donc constituer un modèle à imiter.
Une question qui se pose aussi reste à savoir : cet évènement est-il un bon signal pour le domaine du retrofit ? Qu’en penser ?
Sources
Image de https://www.lejournaldesentreprises.com/article/la-start-up-lormauto-stoppee-dans-sa-course-au-retrofit-et-liquidee-2120237
https://www.initiative-calvados.fr/portrait-10-sebastien-rolo.html
https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F36875
https://www.linkedin.com/company/automobiles-dangel/?originalSubdomain=fr
https://www.linkedin.com/feed/update/urn:li:activity:7330925416762732547/
